Les représentantes de la PFSCE et de la FAAI en ligne avec Sarobidy et Olivier lors d'un rendez-vous de plaidoyer © Apprentis D’Auteuil
Les représentantes de la PFSCE et de la FAAI en ligne avec Sarobidy et Olivier lors d'un rendez-vous de plaidoyer © Apprentis D’Auteuil

Pré-session EPU de Madagascar : le discours de Sarobidy, une fille en situation de rue, un destin générationnel

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Les représentantes de la PFSCE devant l'ONU Les représentantes de la PFSCE devant l'ONU © Apprentis D’Auteuil
Les représentantes de la PFSCE devant l'ONU © Apprentis D’Auteuil

La semaine passée, nous avons accueilli notre partenaire local de Madagascar, la Plateforme de la Société Civile pour l’Enfance (PFSCE), dans le cadre de la pré-session de l’Examen Périodique Universel* de Madagascar. Sarobidy et Olivier, deux adolescents soutenus par la PFSCE, devaient venir prononcer un discours à Genève devant les diplomates. Malheureusement, en raison d’un refus de visa, ils n’ont pas pu être présents. Par conséquent, la vice-présidente de la Plateforme a fait résonner leurs voix à l’ONU en lisant le discours préparé par Sarobidy lors de la pré-session de Madagascar. Un moment fort en émotion, on vous raconte ! 

« Je suis Sarobidy, représentante des enfants à Madagascar. Nous avons travaillé dur, avec l’aide de nos éducateurs et des organisations qui se battent pour nos droits, pour vous partager notre vision, nos défis, et nos espoirs. Ce que nous vous disons est basé sur nos propres expériences et celles de nos amis. » 

Extrait du discours de Sarobidy 

La PFSCE est l’un des plus grands réseaux nationaux dédiés à la protection de l’enfance et des droits de l’enfant à Madagascar. En amont de l’EPU de Madagascar, la PFSCE et son comité des enfants ont rendu deux rapports aux Nations Unies sur la situation des droits de l’enfant à Madagascar, en vue de la pré-session avec la société civile.

Le premier rapport a été élaboré par le Comité des enfants, composé de 20 enfants pour un mandat de 2 ans et soutenu par la PFSCE. Le second rapport a été rédigé par la PFSCE en collaboration avec la société civile. Le rapport du Comité des enfants contient les témoignages de plus de 705 enfants consultés sur leurs droits et certaines des problématiques auxquelles ils sont confrontés autour du droit à la santé et à l’éducation, le travail des enfants, les violences, les enfants sans appui parental, en conflit avec la loi, en situation de rue et handicap. 

En dépit de leur absence en présentiel, Olivier et Sarobidy, membres du Comité des enfants de la PFSCE, ont pu participer en ligne à des rencontres hybrides avec des diplomates où ils ont eu l’opportunité de témoigner de la réalité des enfants et de présenter leurs recommandations destinées à l’Etat malgache. 

La réalité des enfants à Madagascar 

Les droits des enfants en situation de rue ne sont pas garantis ni mis en œuvre à Madagascar. Nombreux d’enfants n’ont pas d’identité officielle, ce qui les empêche aussi d’accéder à l’école. De plus, ces écoles sont implantées dans des zones difficilement accessibles pour les enfants malgaches. Leur droit à la santé est souvent bafoué en raison d’une malnutrition quotidienne et de l’absence de protection sociale. Ils sont alors contraints de travailler et/ou mendier et/ou vivre dans les rues tous les jours. 

Les enfants en situation de rue sont souvent discriminés à cause de leur apparence, leur situation financière ou leur couleur de peau. Ces enfants sont exclus et marginalisés de la société et subissent plusieurs stigmatisations de la part de la société. En effet, ces enfants sont généralement rabaissés, méprisés et exclus de la communauté. 

« Nous avons l’impression que personne ne se soucie vraiment de notre protection. Cela doit changer. » Extrait du discours de Sarobidy

Ces enfants n’ont pas accès à leur droit à la protection, notamment en raison de l’absence ou du nombre insuffisant d’infrastructures adéquates pour leur prise en charge. Viols, tentatives de viol, atteintes sexuelles, extorsion, vols, coups et blessures, telles sont les violences typiques dont les enfants en situation de rue sont victimes. 

Lors du dernier cycle de l’EPU en 2019, le gouvernement malgache avait accepté la recommandation invitant l’état à poursuivre une politique accélérée sur les systèmes d’enregistrement et d’actes de naissances. Il a également accepté la gratuité des mesures d’enregistrement des naissances et accessible à tous. Cependant, encore maintenant, compte environ 40% d’enfants non enregistrés. Sans une personne civile responsable de leur situation, ces enfants sont dans l’incapacité de s’enregistrer dans leur gouvernement, ce qui retarde et empêche l’accès à une éducation qui pourrait les sortir de cette situation précaire. 

« Ces enfants sont des personnes fantômes, sans identité ils n’ont accès à rien. » 

Témoigne la vice-présidente de la PFSCE. 

L’exemple de Sarobidy, issue d’une famille à la rue de génération en génération, illustre parfaitement les obstacles auxquels font face de nombreux enfants vulnérables qui, dépourvus d’une identité, se retrouvent ainsi privés de nombreux droits fondamentaux comme leur droit à la participation pour leur plaidoyer. 

Le gouvernement malgache doit reconnaître les multiples défis que doivent surmonter les enfants, en particulier ceux en situation de rue.

« Chers diplomates, aujourd’hui, nous sommes les voix des enfants de Madagascar. Nous savons que vous avez le pouvoir de changer les choses. Nous croyons que si nous travaillons ensemble, nous pouvons bâtir un avenir où chaque enfant pourra aller à l’école, manger à sa faim, recevoir les soins dont il a besoin, et être protégé contre la violence. » 

Extrait du discours de Sarobidy

Nous espérons que lors de la session EPU de l’Etat malgache en janvier 2025, les préoccupations présentées par la société civile, ainsi que celles des enfants, seront prises en compte dans les recommandations qui seront adressées au gouvernement par les représentants des autres Etats. Il est crucial qu’en suite l’Etat malgache prenne des mesures concrètes pour la mise en œuvre des recommandations qu’il aura reçues, afin de garantir les droits fondamentaux de tous les enfants à Madagascar. 


*EPU : Il s’agit d’un mécanisme qui permet au conseil des Droits de l’Homme de l’ONU d’examiner la situation dans chaque pays membre de l’ONU au regard de tous droits humains confondus. Il s’agit d’un mécanisme d’examen par les pairs, ce sont donc les Etats eux-mêmes qui formulent des recommandations à l’Etat examiné pour améliorer la mise en œuvre de ces droits.