Collège de Hammana - Laure et Marise, élèves de terminale, devant le collège. © Ségolène Ragu/Apprentis d’Auteuil

Soutenir les élèves en difficulté au Liban : le quotidien des professionnelles du Collège de Hammana

Le collège Notre-Dame du Bon Pasteur de Hammana est situé dans la région montagneuse du Mont-Liban, à 25 km de Beyrouth. Il compte 346 élèves, issus de divers horizons et toutes religions confondues, druzes, chrétiens ou musulmans. Ces élèves sont soutenus par des professionnels tout au long de leur scolarité. Une attention particulière est portée aux jeunes filles qui grandissent au cœur d’une société qui peut les considérer inférieures aux autres. Mais à quelles difficultés font face ces jeunes dans leur parcours ? Rencontre avec les professionnelles qui les accompagnent au quotidien !

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Collège de Hammanna - portrait de Solange, l'assistante sociale © Ségolène Ragu/Apprentis d’Auteuil

Solange Assaf, l’assistante sociale du collège, explique les enjeux rencontrés dans la prise en charge éducative des jeunes : « 30% des élèves, confie-t-elle, ont des difficultés d’apprentissage, et subissent au sein de leur famille de la violence physique ou verbale. Je suis confrontée à des problèmes tous les jours : certains enfants souffrent de dyslexie ou d’hyperactivité. Je remarque un manque de concentration, de l’agressivité envers les autres élèves. Tout cela se répercute sur les apprentissages et les résultats scolaires. Certains, à la présentation d’un mauvais bulletin à leurs parents, sont réprimandés par des gestes physiques et violents, d’autres, menacés de devoir abandonner l’école. Dans ce cas dit-elle, ils sont orientés vers la psychologue, parallèlement à un suivi des parents que les équipes rencontrent une fois la semaine. »

Accompagner les familles et surtout les mères, pour que l’attitude éducative et le comportement envers les enfants changent, contribue à redonner à tous confiance et assurance : « Accepter de coopérer reste la condition pour que cela réussisse, ajoute Solange, car certains parents sont réticents. »

Par manque de moyens, il arrive que des parents ne veuillent plus scolariser leur enfant. Dans cette situation, l’établissement intervient et scolarise l’enfant gratuitement. À l’école, c’est l’équipe formée de l’éducatrice spécialisée, de la psychologue et de l’assistante sociale, qui réfléchit au plan de suivi des enfants. Jamal Chaya, psychothérapeute, intervient deux fois par semaine au sein de l’établissement. Elle nous raconte les enjeux de son quotidien.

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Collège de Hammanna - portrait de Jamal, la psychologue © Ségolène Ragu/Apprentis d’Auteuil

Tous les enfants ne se présentent pas seuls à vous. Comment arrivez-vous à déceler leurs troubles ?

« Certains enfants viennent de leur propre chef. Il m’arrive d’assister au cours pour observer les enfants, relever un manque de concentration, une agitation, une hyperactivité dont ils font preuve, souvent inconsciemment. Certains souffrent de bégaiement grave. Les petites classes sont plus faciles à lire au niveau des problèmes. Quant aux grandes classes, les élèves font un effort en ma présence, ce qui me pousse à me référer aux professeurs pour avoir plus d’informations. 

Certains se présentent à moi pour un suivi psychologique, me demander conseil et se confier, c’est à ce moment-là que je demande à rencontrer les parents, car je ne peux intervenir sans leur approbation. Seuls quelques parents font un blocage et refusent de coopérer. En séance je prends mon temps, ne force jamais quiconque à parler, mais cherche à instaurer une relation de confiance. Il y a des cas plus graves que d’autres, mais je traite tous les enfants avec la même disponibilité et la même attention, car la souffrance n’a pas de degrés. »

Est-ce qu’il arrive que des parents viennent vers vous ?

« Un couple un jour a demandé à me voir. Ils étaient dans le désarroi et reconnaissaient leur erreur. Le mari et sa femme se violentaient mutuellement sans limite aucune, pour terminer par se défouler sur leur enfant. J’ai d’abord entamé une thérapie de couple pour rétablir un équilibre à la maison. Après un certain temps, les bienfaits de cette thérapie de couple ont rejailli sur le comportement de l’enfant. »

L’établissement est géré par notre partenaire local, les Sœurs du Bon Pasteur, et s’inscrit dans une action plus large portée au Liban, incluant deux autres centres dédié à des jeunes filles en situation de vulnérabilité. Le projet APPI (Autonomisation, Protection, Prévention et Insertion) vient en aide à plus de 800 jeunes chaque année, en leur proposant notamment des hébergements d’urgence, du soutien scolaire et de l’accompagnement psychosocial.