Joseph Likibi et André Kabi du REIPER aux Nations Unies à Genève ©Apprentis d’Auteuil

Revue du Congo par le Comité des Droits de l’enfant : un aboutissement favorable de notre travail de plaidoyer

Le 8 février, le Comité des Droits de l’enfant a publié ses observations finales sur le Congo, l’aboutissement du processus d’examen sur la situation des droits de l’enfant auquel nous avons participé avec le REIPER, notre partenaire local et les enfants que nous soutenons sur place. En mai dernier, le Coordinateur national du REIPER et des enfants avaient participé à la pré-session du Comité à Genève pour leur partager nos constats et nos recommandations.  

Nous revenons sur cette expérience et ses résultats.

Qu’est-ce que le Comité des Droits de l’enfant ?

 

Composé de 18 experts indépendants, le Comité des droits de l’enfant des Nations-Unies veille au respect de la Convention relative aux droits de l’enfant de 1989, par les États qui l’ont ratifiée. Le Comité examine périodiquement les Etats qui doivent rendre un rapport sur la situation des droits de l’enfant dans leur pays. Cette évaluation implique aussi la participation de la société civile qui est invitée à transmettre ses propres constats et ses recommandations.

Notre participation : l’élaboration d’un rapport représentatif de la réalité 

 

Afin d’apporter une vision qui soit la plus complète possible au Comité, nous avons préparé un rapport alternatif avec les 22 organisations membres du REIPER, notre partenaire historique et unique réseau national sur la protection de l’enfance, ainsi que les enfants qu’ils accompagnent. Pour optimiser la compréhension et l’impact de ce rapport, Joseph Likibi, Coordinateur du REIPER et André Kabi, représentant du REIPER se sont rendus à Genève pour participer à la pré-session et partager nos constats au Comité. 

Ensemble, nous avons fait état des carences du système étatique congolais de protection de l’enfance qui rend difficile la prise en charge des enfants ayant besoin d’un accompagnement. Nous avons partagé notre préoccupation concernant les violences et les discriminations vécues par certains publics d’enfants en particulier les filles, les enfants en situations de rue, de handicap, les enfants autochtones et les mineurs incarcérés. Ce manque de considération et d’investissement constituent un obstacle à la mise en place de mesures adaptées pour ces enfants. 

Dans la rue, les droits des enfants ne sont pas respectés. Beaucoup d’enfants souffrent parce qu’ils ne peuvent pas manger et vivent dans l’insécurité. Ils peuvent être tués, attrapés, et mis en prison. Parfois ils subissent un viol, une agression, ou sont traités de « sorciers ».
Jeune garçon ayant été en situation de rue
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Notre priorité : porter la voix des enfants 

 

Afin d’être au plus près des problématiques rencontrées par les enfants et les jeunes, et d’élaborer des recommandations adaptées à leurs besoins, nous avons impliqué plus de 200 enfants soutenus par le REIPER dans la rédaction de notre rapport alternatif au Comité.

Durant divers ateliers, les enfants se sont exprimés sur leurs droits tels que le droit à l’éducation à la santé, à l’alimentation, à la famille, aux loisirs, à la protection contre les violences ou encore le droit à l’identité. Une grande partie des enfants ont partagé des expériences liées à l’insécurité, la maltraitance et la stigmatisation. 

En mai, 5 jeunes ont été conviés à échanger avec le Comité à distance. Cette discussion privée a permis aux enfants de partager leurs vécus et aborder les sujets qui leur tiennent à cœur comme notamment le phénomène des enfants accusés de sorcellerie par leur communauté et qui sont souvent chassés ou abandonnés. 

J’ai apprécié pouvoir partager mon opinion avec le Comité et répondre aux questions. On a parlé des enfants dits « sorciers ». C’est un sujet qui est important car il est mal compris et les enfants sorciers sont rejetés par les adultes.
Jeune fille ayant participé à la pré-session avec les experts indépendants du Comité des droits de l’enfant

Les observations finales du Comité, un signal fort 

 

À l’issue de l’examen du Congo et de la publication des observations finales par le Comité, nous constatons avec optimisme que les informations et nos recommandations que nous avons fourni ont été pris en considération par le Comité.  

En effet, partageant notre inquiétude quant aux violences physiques et psychiques auxquels les enfants font face, surtout lorsqu’ils sont dans une situation de vulnérabilité, le Comité recommande à l’État congolais de “prendre les mesures nécessaires afin de faire changer durablement les mentalités, par des moyens juridiques et de sensibilisation”. Par ailleurs, le Comité insiste sur la nécessité d’”adapter le système judiciaire afin que les violences soient réprimées (...) et que soit prise en considération la condition de minorité des enfants, notamment grâce à la formation du personnel judiciaire et des forces de l’ordre, mais aussi par la mise en place de structures spécifiques”. 

Pour ce qui est de l’accès à l’éducation et aux soins de santé, le Comité abonde dans le sens de notre rapport en demandant à l’État d’abolir les frais de scolarité afin de rendre l’école réellement accessible à tous sans discrimination, mentionnant notamment l’exclusion subies par les enfants autochtones ou porteurs de handicap. 

Aussi, dans une section dédiée aux enfants en situation de rue, le Comité recommande au Congo de prendre les mesures nécessaires afin de comprendre les raisons pour lesquels ces enfants se retrouvent dans cette situation afin de mettre en place des solutions préventives mais aussi subséquentes afin d’assurer leur protection contre la détention arbitraire et les violences. 

Enfin, le Comité a souligné l’importance de renforcer les moyens donnés à la société civile, notamment grâce à une formalisation de la collaboration avec l’État et une subvention des structures d’accueil. Un tel soutien étatique est essentiel pour l’accompagnement et la prise en charge de qualité dont les enfants en situation de vulnérabilité ont besoin.

Il appartient maintenant à l’Etat congolais de suivre les recommandations du Comité et agir en faveur des droits des enfants.